Maryse Fraisse et Marie-Thé Sentenat sont deux infirmières à la retraite qui ont écrit un superbe ouvrage en hommage à la profession soignante dans le Velay. Il s’intitule « Une histoire hospitalière au Puy-en-Velay, de l’hospitalité médiévale aux soins du XXe siècle » et il raconte la vie de l’ensemble des personnes qui, comme elles, ont passé des dizaines d’années de leur vie à soigner les habitants du Velay au sein des établissements hospitaliers ponots, dès 1940 et jusque dans les années 2000.

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire ce livre ?

Marie-Thé : En fait, dès le début de nos études d’infirmières, nous avons côtoyé le personnel de soins. Les personnes qui étaient les plus âgées nous ont raconté leurs souvenirs, leurs vécus, la façon dont elles étaient entrées à l’hôpital, bref, une multitude de choses.

Nous en avons côtoyé d’autres tout au long de notre carrière et même lorsque nous sommes parties à la retraite. À chaque fois, elles sont revenues sur leur histoire, leurs anecdotes avec beaucoup de nostalgie. C’est tout cela qui nous a donné envie, avec Maryse, d’écrire ce livre dans un devoir de mémoire.

Il a demandé beaucoup de travail ?

Maryse : C’est un livre de 380 pages dont la couverture est signée Nadine Pleynet. Cela nous a demandé beaucoup de temps, à la fois pour rassembler tous les témoignages et effectuer des recherches au niveau des archives hospitalières. Cela nous a permis de trouver des cassettes enregistrées, mais à un format difficile à lire. Les écrits étaient parfois mal classés et difficiles à lire également, et puis non datés. On s’est lancé dans une recherche très active toutes les semaines pendant 8 ans.

Il a fallu tout remettre dans le contexte de l’époque ?

Marie-Thé : Au départ, nous étions parties sur le regroupement des témoignages, mais nous nous sommes rendu compte qu’il fallait les remettre dans leur contexte, car lorsque les personnes évoquaient, par exemple, une salle de l’Hôtel-Dieu, ou de l’Hôpital général, on s’est dit que personne ne comprendrait où elle pouvait se trouver.

Et puis, dans les souvenirs anciens, il y a des anecdotes qui peuvent être racontées et qui peuvent paraître un peu barbares. Remises dans leur contexte, elles correspondent à des habitudes de vie.

Maryse : Par exemple la célébration de la messe et la prière qui était obligatoire. On peut mal l’intégrer dans nos habitudes d’aujourd’hui. À l’époque, c’était incontournable !

Marie-Thé : Au départ il y avait l’Hôtel-Dieu, et puis un peu plus tard l’Hôpital général. Lorsque l’on imagine les grandes salles dans lesquelles il y avait une soixantaine de lits, cela peut avoir un caractère inhumain aujourd’hui, mais il faut, encore une fois, le rapporter au contexte et aux façons de vivre à l’époque.

C’est un livre d’histoire en quelque sorte ?

Maryse : Oui. Nous sommes remontées jusqu’au Moyen-Age. On sait que l’Hôtel-Dieu existait au 11è siècle, d’après les documents. Au départ, c’était une grande salle avec quelques pièces attenantes et une chapelle. Des bâtiments se sont construits au fil des siècles et cela a mis beaucoup de temps. C’est sous Louis XIV que l’Hôpital général a été construit, pour en fait y enfermer tous les mendiants qui erraient dans les rues et qui créaient de l’insécurité.

C’est quelque chose que peu de gens savent. Ensuite, il y a eu la création de la clinique Bon Secours, en lien avec les religieuses qui avaient été embauchées entre temps, avant le début de la construction de l’hôpital Emile-Roux en 1933. Il faut préciser, par exemple, que la première école départementale d’infirmières a été créée en 1945 à la clinique Bon Secours, sous l’impulsion de quelqu’un de très charismatique, sœur Jean Etienne.

Marie-Thé : Et puis, il y a eu effectivement les grandes figures qui ont marqué l’histoire comme les religieuses, et ce, dès 1733 avec l’arrivée des sœurs de la Croix de Saint-Pal-en-Chalencon qui ont pris en charge l’hôpital général.

En 1825, ce sont les sœurs de la très Sainte Trinité de Valence qui ont pris en charge l’Hôtel-Dieu et qui l’ont fait fonctionner d’une façon plus élaborée au niveau des soins, avec des interventions chirurgicales. Les mères supérieures ont également marqué l’histoire. Elles avaient à faire à la commission administrative qui avait pris un certain pouvoir depuis la Révolution.

Le pouvoir religieux se manifestait par le biais de l’Evêque, des aumôniers et il y avait souvent des confrontations. Elles étaient obligées de s’imposer. L’histoire a également été marquée par les prières et les rites religieux, la messe obligatoire pour les patients et le personnel.

On y trouve également des documents, des photos et des cartes postales ?

Maryse : Oui. On s’est basé sur des cartes postales et des documents personnels qui permettent de retracer la vie, l’histoire et les bâtiments de l’époque. Il y a des photos des religieuses trinitaires avec des costumes très significatifs. À notre grand regret, on a limité la publication de portraits de personnalités en raison des droits à l’image.

Marie-Thé : Et puis, il y a un lexique avec des termes que nous avons entendus tout au long de notre carrière. Pas mal de personnes continuait à parler le patois durant nos études. Il y avait un certain parler local qui reflétait bien la vie au Puy-en-Velay. À l’époque, les patients et les soignants parlaient le même langage.

Comment peut-on se le procurer ?

Marie-Thé : À la FNAC, à la Maison de la Presse et également à la librairie L’Arbre à Livres, rue Saint-Jacques, au Puy-en-Velay. On peut également le commander par mail à l’adresse : livrehopital@ik.me

Pratique :
Maryse Fraisse et Marie-Thé Sentenat seront présentes au salon du livre d’Espaly le 29 avril.